Hommage à Philippe Barrière (1950–2021)

C’est avec une grande tristesse que nous avons appris à la mi-août le décès de notre ancien collègue Philippe Barrière. Professeur à l’École d’architecture de 2008 à 2019, Philippe aura été une figure pour le moins remarquable au sein du corps professoral. Son approche pédagogique – ouverte et décomplexée, toujours inclusive – aura laissé une trace marquante dans le parcours d’une dizaine de cohortes de futurs architectes au Québec. Citoyen du monde, aux mille et aucun ancrage à la fois, nous le remercions d’avoir partagé avec nous une part de son aventure.

Nous vous invitons à lire cet hommage rédigé par son collège et ami, Jacques White, professeur à l’École d’architecture :

 

Philippe Barrière, professeur à l’École d’architecture de l’Université Laval (2008-2019)

Plus qu’un collègue fascinant, Philippe était un homme libre, sans attache, apparemment sans âge; souriant, mais visiblement tourmenté. Sa communauté était l’humanité. Il dédaignait emprunter les chemins balisés, préférant explorer à sa manière des sentiers qu’il jugeait plus fertiles en découvertes et dont il connaissait bien les richesses, les nuances et les ramifications. Il était parfois difficile à suivre, mais les points de vue auxquels conduisaient ses sentiers étaient souvent exceptionnels. Volontairement, il n’allait jamais droit au but; surtout, questionnait-il le but. Poser de bonnes questions et s’y attarder était pour lui plus stimulant que de soulever quelques réponses. Sa recherche d’émancipation était constante. D’une grande générosité envers ses étudiants et les collègues qui voulaient bien partager avec lui ses hésitations, ceux qui l’ont côtoyé en ont été transformés.

Sans doute pourrait-il mieux décrire lui-même les chemins qu’il empruntait et ce qui le motivait. J’imagine qu’il aurait apprécié que je partage des extraits du dernier message qu’il m’ait envoyé, le 24 mars 2021, depuis Tunis où il venait de s’établir :

« J’ai toujours fondé un très grand espoir dans les écoles d’architecture et à la fois je reste sans illusion sur elles […]. Pour quelqu’un comme moi qui n’a jamais eu le sens de l’appartenance, être face au bleu du ciel et de la mer me permet de faire enfin face à un territoire dans lequel je me retrouve très à l’aise, enfin libre. J’ai même oublié la sensation des flocons de neige qui vous saupoudrent en hiver à Québec […]. J’ai la possibilité de continuer mes projets déjà entrepris et donc de changer d’enseignement à la pratique. […] Toutefois avec la pandémie et la crise économique politique et sociale qu’elle a créé (qui existait déjà) tout reste à ce jour incertain et imprévisible quant à l’avenir. »

L’incertitude et l’imprévisibilité qu’évoquait alors Philippe prennent aujourd’hui un tout autre sens avec sa disparition inattendue. La prochaine fois que je poserai un regard sur la Méditerranée, j’aurai pour toi, cher Philippe, une pensée chargée de tout que tu as légué.

 

Jacques White

Architecte – professeur titulaire

Directeur (2007-2009 | 2017-2021)

École d’architecture de l’Université Laval

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Nous vous invitons aussi à lire les mots d’Andrea Bloom et Odile Decq, parus sur The Architect’s Newspaper.